Ukraine : le président Zelensky piloté par Londres ?

jeudi 22 avril 2021

Chronique stratégique du 22 avril 2021 (pour s’abonner c’est PAR ICI)

L’escalade autour de l’Ukraine est d’autant plus dangereuse que règne la confusion. Car les événements qui s’y déroulent sont un véritable théâtre d’ombres dans un cirque. Volodymyr Zelenski, un ancien comédien devenu président, cède de plus en plus aux pressions de l’opposition anti-russe, alors qu’il avait été élu au départ pour apaiser les tensions avec la Russie. Il se retrouve à jouer le rôle d’une marionnette suicidaire dont les fils sont tirés par ses parrains anglo-américains.

Parmi ceux-ci, il y a bien sûr l’Otan et l’administration américaine. Comme nous l’avons rappelé dans notre chronique du 8 avril, Joe Biden et Victoria Nuland (qui vient de réintégrer le Département d’Etat) furent les principaux instigateurs du coup d’Etat de 2014 – un coup d’Etat qui a permis aux factions néofascistes et néonazies d’accéder au pouvoir à Kiev, au gouvernement, au Parlement et au sein de l’armée ukrainienne.

Zelensky et le MI-6

Cependant, les Russes ont récemment pointé du doigt le fait que les services britanniques, notamment le MI-6, sont étroitement impliqués dans l’attitude belliqueuse de Zelensky.

Il faut souligner tout d’abord qu’au moment où l’administration Biden a semblé reculer dans l’escalade, en annonçant l’annulation du déploiement des deux destroyers qui entraient en mer Noire, le ministère de la Défense britannique a décidé le 18 avril d’y envoyer deux navires de guerre rattachés au porte-avions Queen Elizabeth, escortés par des chasseurs de combat. Quelques jours plus tôt, le tabloïd britannique The Mirror rapportait l’arrivée en Ukraine d’une unité des forces spéciales britanniques, ainsi que le déploiement dans la région des unités de communication spécialisées du corps Royal Signals.

La semaine dernière, une émission spéciale diffusée sur la chaîne Rossiya1 a accusé les services secrets britanniques d’être « de connivence avec l’Ukraine pour déclencher une guerre sanglante en Europe ». Selon l’expert Sergey Kurginyan, le MI-6, avec notamment son chef Richard Moore, est devenu « une force dominante en Ukraine ». « le scénario belliciste de Zelensky provient directement de Richard Moore du MI-6. Les services secrets russes en sont parfaitement conscients », écrit le journaliste Pepe Escobar sur le site The Saker.

En octobre dernier, lors de sa visite à Londres, Zelensky a eu une entrevue de deux heures avec Richard Moore, portant sur « l’aide et la protection de notre souveraineté et notre intégrité territoriale », comme le président ukrainien l’a admis lui-même. A son retour de Londres, Zelensky a pris une série de mesures, dont certaines portant sur l’assistance militaire américaine et britannique à l’Ukraine. Il s’est mis à évoquer le mémorandum de Budapest de 1994, qui avait accordé à son pays des garanties de sécurité en échange des armes nucléaires restées sur le territoire ukrainien suite à l’effondrement de l’Union soviétique. Puis il s’est rendu à Ankara (où Richard Moore a été ambassadeur avant de prendre la tête du MI-6), pour y rencontrer le président Erdogan et mettre en place avec lui une « plateforme criméenne » vouée au retour de la Crimée à l’Ukraine.

Diviser pour régner

L’implication des services britanniques dans les manipulations contre la Russie n’est pas nouvelle. Alexey Navalny par exemple, dont l’état de santé déclinante est joué dans les médias pour faire monter les tensions, est lui-même un agent d’influence britannique depuis plusieurs années, opérant en lien avec l’oligarque russe exilé à Londres Mikhail Khodorkovsky. Comme l’ont révélé les services de renseignement russes en février, Vladimir Ashurkov, le dirigeant de l’organisation « anti-corruption » de Navalny (FBK), était en contact en 2012 avec James William Thomas Ford, le responsable de l’ambassade britannique à Moscou, lui-même proche de Richard Moore et soupçonné d’être d’un agent du MI-6.

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Pour Londres, la stratégie est toujours de « diviser pour régner », en empêchant toute possibilité d’entente Est-Ouest et Nord-Sud, comme le proposent aujourd’hui la Russie et la Chine ; y compris en s’assurant que la présidence américaine se conforme à ses vues impérialistes — « le muscle américain et le cerveau britannique », comme aimait le dire Keynes. C’est pourquoi l’arrivée au pouvoir de Biden, qui s’est engagé dès son premier entretien officiel avec Boris Johnson, en janvier, à renforcer la « relation spéciale » anglo-américaine, a été accueillie avec un grand enthousiasme outre-Manche.

« Le secret de polichinelle de toute l’affaire de l’Ukraine et du Donbass est bien sûr la Chine, écrit Pepe Escobar. Dans des conditions ’normales’, l’Ukraine ferait non seulement partie d’un corridor intégré à l’Initiative de la Ceinture et la Route (ICR), mais aussi du projet russe de la Grande Eurasie ». L’intégration de l’Ukraine et du Donbass dans la Renaissance des Nouvelles Routes de la soie, qui permettrait d’interconnecter les économies à travers les infrastructures de transport et le commerce interrégional, est en effet une perspective qui n’enchante pas du tout les dignes héritiers de l’Empire britannique.

L’escalade actuelle ne pourra être stoppée que par la reprise du dialogue au plus haut niveau, afin de couper l’herbe sous le pied des va-t-en-guerre.
Les Russes le savent, et c’est pourquoi ils ne cessent d’affirmer que la seule solution pour l’Ukraine passe par les accords de Minsk 2 (signés par l’Ukraine, la France, l’Allemagne et la Russie et reconnus par l’ONU).

Par ailleurs, lors de son intervention télévisée du 21 avril, Vladimir Poutine a réitéré sa proposition d’organiser un « Sommet du P-5 » entre les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, c’est-à-dire les cinq grandes puissances nucléaires.

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